lundi 1 juillet 2013

Chapitre 28 - L'étrange affaire du petit pont caché

"I'm going for a few days to see my friend Nicowla, in Diouwam".
"Perdon, where ?"
"Diouwam... Dewam... Daham... Deham... It's, like... in the North of England."
"Hmmm."
"Let me spell it to you. D... U... H... wait, no, R... or H, there is a f*** H somewhere..."
"..."
"Nervermind. Let's just say I'm going somewhere. If I'm not back in three days, just call the cops, ok ?"

Comme j'ai donc tenté de l'expliquer péniblement à mes amies anglaises, j'ai profité de la fin de mes exams et de l'invitation de Nicolas pour faire une pause dans mes péripéties londoniennes. N'écoutant que mon courage, j'ai donc décidé de me rendre dans un endroit 1) dont je ne pouvais pas prononcer le nom 2) que je ne savais pas placer sur une carte (mais bon, si je commence à ne plus voyager en fonction de ce dernier critère...).
Et, en guise de trailer, je vous propose la vidéo suivante :


(Elle ne dure que 50 secondes mais elle vaut le coup d'oeil, avec plus de suspens, d'actions et de musiques émouvantes que dans un film américain... Avec des guests stars prestigieux, dont Ze Queen. On sent que c'est une production à gros budget).

Bon, je vais dès à présent lever le suspens : dès mon arrivée, il a plu. En même temps, le Nord se visite pour ses richesses architecturales, pas son climat tropical. Entre le Nord de l'Angleterre et l'Ecosse, vous aurez compris que je ne choisis pas mes amis en fonction de leur destination de 3A.


J'aurais peut-être dû.

(Et puis, il a fait beau le deuxième jour).

Bon, mais revenons-en à Durham. Vous n'en aviez probablement jamais entendu parler avant de venir sur ce blog (sauf si vous êtes Chinois, parce qu'apparemment c'est très connu en Chine), mais c'est la troisième université du Royaume-Uni (sources : Nicolas, Wikipédia). Juste après Oxford et Cambridge. Durham aimerait bien s'incruster dans le club VIP  "Oxbridge" (et former "Doxbridge"), mais ce n'est pas du goût des deux premiers, parce que le principe d'un club d'élite c'est de ne laisser personne entrer. Je vous propose de sauter l'analyse politico-historique et de résumer la situation actuelle à l'aide de ce petit gif avec des chats : 


Maintenant que la situation est clarifiée, reprenons. Durham est une excellente université, donc, et comme Oxford et Cambridge il s'agit d'une ville-campus (mais beaucoup plus petite).

Nicolas m'a fait visiter les environs.










Et m'a annoncé après 2h de ballade que j'avais vu 75% de ce qu'il y avait à voir à Durham. Réaction de la londonienne :


Le premier jour, nous avons notamment visité l'attraction locale, à savoir la Cathédrale.


Sur la porte se trouve la mascotte officielle de la ville :


Oui, je sais, c'est curieux comme mascotte, mais ils n'avaient pas d'animaux mignons comme les vaches poilues écossaises en stock...

Nous sommes montés au sommet de la cathédrale. Et comme bien entendu, au Moyen-Âge, personne n'a eu l'intelligence de prévoir un espace dans les cathédrales pour quand on inventerait l'ascenseur, il a fallu monter des marches. Or, je crois que je suis marches-de-cathédrales-du-moyen-âge-o-phobe. Mais j'ai su rester stoïque.
J'ai pris sur moi pour n'en faire que 247 fois la remarque à Nicolas pendant la montée des marches.
Une fois arrivés en haut, nous avions une vue imprenable sur les environs :





Enfin, on en aurait eu une s'il avait fait beau.

Après la série de photos dans le brouillard de rigueur, il a fallut redescendre... Mais mes efforts ont été récompensés, car une fois redescendus, nous avons obtenu un prestigieux trophée :


Un sticker "I've climbed Durham Cathedral Tower" ! Tellement trop badass que je vais me le faire tatouer histoire que tout le monde sache quelle dure à cuire je suis.




Mais la principale occupation de mon séjour aura été... L'étrange affaire du petit pont caché.
Laissez-moi vous narrer les faits.
Durham, vu du ciel :


La ville est entourée par une rivière. Or, qui dit rivière, dit pont. Nicolas m'explique qu'il y en a quatre à Durham, et que l'un d'entre eux est... Le petit pont caché (appellation contrôlée). Je me suis immédiatement impliquée dans la recherche dudit pont, étant amatrice de mystères. Je pensais que c'était un peu l'attraction locale qui fait se déplacer les foules de touristes : "le petit pont caché de Durham", comme "la tour penchée à Pise", ou "la tour Eiffel à Paris".
Je me suis donc mis à la recherche d'un pont pas trop grand et mystérieux. Et pour qu'il soit "caché", je me suis dit qu'il devait être bien caché... Peut-être entre deux bâtiments, ou derrière une porte, ou dans une ruelle mystérieuse.
Puis, après deux jours de recherches infructueuses, Nicolas m'annonce : "Non, en fait, il n'est pas vraiment caché, c'est le pont qu'on peut apercevoir depuis le pont principal qu'on a traversé plusieurs fois et que tu as déjà pris une dizaine de fois en photos".


Vous imaginez ma déception.


Au final, ce pont devrait plutôt s'appeler "le petit pont pas si bien caché que ça". Arrêtons de vendre du rêve aux touristes s'il n'y a pas lieu de le faire.



Refermons ce triste dossier et revenons-en à Durham.

La comparaison avec Oxford et Cambridge s'imposait. Durham est une ville beaucoup plus petite (trois rues commerçantes...). Beaucoup plus verte, aussi : la rue principale est bordée de forêt à l'Est (comme on peut le voir sur la photo ci-dessus, prise à partir du pont qui fait partie de la rue principale).
J'ai préféré Durham à ses deux célèbres cousins. Durham m'aura laissée l'impression d'être une ville un peu coupée du monde. Non pas que Durham soit réellement coupée du monde ; je ne suis pas en train de dire que les gens vivent là-bas comme au 18ème siècle (il y a le wifi, du réseau, des voitures, et Newcastle est à moins de 30 minutes en train). Mais les bâtiments du campus aussi anciens que l'Angleterre (non, pas aussi anciens, mais c'est une image, ne chipotez pas sur les détails), la nature qui entoure la ville m'ont donné l'impression d'une bulle.
C'est bien sûr une impression personnelle, très liée au contexte... Je suis allée à Durham le lendemain de mon dernier examen ; j'avais passé les jours précédents à courir à droite à gauche, j'en avais marre de ma coloc, de passer du temps dans les transports bondés pour me rendre à mon centre d'examens... Je faisais une overdose de vie londonienne. Alors, bien sûr, ça a joué sur mon appréciation... Et puis, c'est toujours différent de visiter une ville quand on y connaît quelqu'un qui nous fait visiter. J'ai beaucoup aimé Oxford et Cambridge, mais... à cause de leurs excellentes réputations, ces villes sont un peu trop impressionnantes, presque irréelles. Comme si personne n'étudiait là, mais qu'on payait des figurants pour faire plaisir aux touristes. Comme Nicolas m'a fait visiter, j'ai eu l'impression que Durham était une ville beaucoup plus chaleureuse, et j'ai pu rencontrer ses amis, de "vrais gens" ; Durham m'a donc semblé être une ville beaucoup plus réelle.



Ce qui était amusant, en allant à Durham, c'était que j'ai pu vivre le quotidien de quelqu'un qui a fait un choix de 3A complètement différent du mien (l'expression "vivre le quotidien" est mal choisie, on dirait que j'ai participé à une téléréalité genre "vis ma vie"... Remarque, peut-être que si je proposais le concept de "vis ma 3A" à Sciences Po TV, ça les intéresserait ?). Nicolas et ses amis avec qui j'ai eu l'occasion de discuter m'expliquaient qu'ils avaient choisi de venir ici parce que c'est une ville à taille humaine, que vivre dans une grande ville comme Londres est dépersonnalisant, que la qualité de vie est meilleure dans une petite ville que dans une métropole (le coût de la vie est inférieur, moins de circulation, pas besoin de prendre les transports en commun, etc.). Raisons que je comprends ; loin de moi l'idée d'envoyer tout le monde à Londres ! Je comprends qu'on puisse choisir Durham, même si j'aurais été incapable de vivre là-bas. Je suis trop habituée à la pollution, la circulation, les transports, l'agitation, les bruits de la ville... J'aurais eu peur de m'ennuyer, dans une aussi petite ville. J'ai toujours besoin d'être en mouvement, d'aller quelque part, de faire quelque chose ; je suis un peu hyperactive... Même si je sature par moment, que je maudis les touristes, les londoniens, les parisiens et les autres, je finis toujours par être heureuse d'être là à nouveau. C'est comme une addiction ; je sais que c'est mauvais, mais je ne peux pas m'en passer.
Au final, même si j'ai beaucoup aimé Durham, cette parenthèse m'aura fait comprendre que j'adore vraiment Londres (avais-je vraiment besoin de ça ?) et que je ne changerais mon choix pour rien au monde... Cela m'a guérie de mon overdose londonienne.
Londres et moi, on s'est réconciliés.



Et puis, ce voyage aura été bénéfique sur un autre plan : j'ai pu prendre conscience d'une chose en discutant avec les étudiants de Durham... Je manque de vocabulaire. à chaque fois que quelqu'un me demandait comment c'était de vivre à Londres, je répondais "It's amaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaazing !!!!!" avec autants de "a", de "!" et d'enthousiasme qu'une Américaine qui visite Paris pour la première fois.


Le reconnaître, c'est le premier pas vers la guérison, pas vrai ?
Allez, j'ajoute "awesome" à mon vocabulaire, comme ça la prochaine fois je pourrai varier.



Et quand je suis revenue à Londres, j'arrivais à prononcer "Durham" correctement : mes amies anglaises m'ont comprise du premier coup ! J'aurai beaucoup appris pendant ce voyage...

1 commentaire:

  1. Le petit pont caché n'est pas vraiment caché mais le chemin pour y accéder l'est ;) (il faut descendre les marches d'une rue difficile à trouver et longer la rivière sans se tromper de chemin (eg. prendre le chemin qui mène à la cathédrale)).
    Je me devais de rétablir la vérité.

    PS: tu vois que j'ai bien fait de prononcer 'Durham' à l'anglaise pendant tout ton séjour :)

    Nicolas.

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